
Un programme d'Éducation à la Vie Affective, Relationnelle et Sexuelle
Le mot « EVARS » a fait irruption dans le débat public à la fin de l’année 2024 en raison de l’actualité de la publication du programme d’Éducation à la Vie Affective, Relationnelle et Sexuelle le 6 février dernier, pour une entrée en vigueur à la rentrée scolaire 2025.
Au niveau national, l’élaboration du programme d’EVARS a déclenché des vagues de résistances et de fake news de la part de franges réactionnaires allant de la droite catholique traditionnelle à l’extrême-droite, héritières de la Manif pour tous et relayées par les sénateurs LR et les médias Bolloré. Ces attaques sont menées par des associations de parents d’élèves faussement apolitiques (parmi lesquelles Mamans louves, Parents Vigilants, Parents en colère), le Syndicat de la famille et SOS-Éducation – les premiers dans une filiation zemmouriste et/ou antivax assumée, les seconds soutenus par l’ex-ministre délégué en charge de la « Réussite scolaire et de l'Enseignement professionnel », Alexandre Portier.
La publication du programme est une avancée mais, comme l’explique le Collectif Enfantiste sur Instagram, elle s’est faite au prix d’un lissage des propositions des militant-es et des professionnel-les de l’EVARS. Dans cette dernière version édulcorée, plusieurs sujets sont abordés plus tard que prévu au cours de la scolarité – l’identité de genre et les parcours trans, le consentement et la prévention des violences sexistes et sexuelles – ; certains sont tout bonnement invisibilisés – l’homoparentalité, les existences trans, non-binaires, intersexes et asexuelles – ; et d’autres sont réduits à une approche scientifique – l’éducation menstruelle. Comme l’explique la journaliste Rozenn Le Carboulec dans sa newsletter Gendercover, entre l’avant dernière version du programme votée à l’unanimité le 29 janvier et la version finale parue une semaine plus tard, la formulation « homophobie et autres » remplace et invisibilise la transphobie, qui ne figure plus nulle part dans le nouveau programme d’EVARS. Ce détail, qui n’en est pas un, témoigne d’un recul face aux pressions conservatrices.
Ce nouveau programme d’EVARS n’est qu’une première étape et tout reste à faire : on est bien loin dans les faits des trois heures d’EVARS par an, obligatoires depuis 2001. En 2024, moins de 15% des élèves en auraient bénéficié. Le personnel de l’Éducation nationale dénonce un manque d’heures allouées et de formations des professeur-es, ce à quoi s’ajoutent les coupes budgétaires pour les associations qui viennent faire de l’EVARS en milieu scolaire.
L'EVARS au Planning Familial 13
En 2023, le Planning familial 13 est allé à la rencontre de 7042 élèves et 558 étudiant-es dans 7 écoles, 24 collèges, 17 lycées et 11 établissements d’enseignement supérieur pour faire de l’EVARS. Ces séances, ce sont des « groupes de parole et d’information » et non des cours sur la sexualité. Il s’agit d’instaurer un espace-temps de dialogue, de débats, à partir des sujets que les élèves amènent elleux-mêmes et sur lesquels iels souhaitent s’exprimer : les animateurices partent de ce que les jeunes disent et savent, des mots qu’iels utilisent. Plusieurs principes guident ces interventions : non-mixité, animation non-directive, discipline moins stricte, confidentialité et non-jugement. Les animateur-ices de préventions travaillent avec les équipes enseignantes en les impliquant dans leurs interventions. Si la présence d’un-e adulte référent-e de l’établissement est obligatoire, elle témoigne aussi de la légitimité et de l’intérêt pédagogique que l’établissement scolaire porte à l’EVARS. L’objectif principal à la fin de ces séances, c’est que les élèves et étudiant-es aient identifié le Planning familial comme un lieu ressource en santé sexuelle.
Des attaques répétées contre l'EVARS
Ces derniers temps, des établissements subissent les attaques directes des organisations de parents – menaces et intimidations des personnels, tracts et courriers envoyés aux parents, vandalisme, voire incendies en Belgique. Elles portent un discours qui allient critique du « wokisme », de la « théorie du genre » et complotisme au service de la désinformation. Selon elles, les militant-es queer et féministes traumatiseraient les enfants en niant « les différences biologiques entre les filles et les garçons », en leur enseignant « le Kamasutra et la masturbation », en rendant les enfants trans, en prônant « le bisexualisme et le polyamour, [en banalisant] les transitions de genre » (Max Brisson, sénateur LR), en « endoctrinant les élèves, les forçant à parler de sexe, ce qui s’appelle de la corruption de mineurs » (Parents en colère). Récemment, un article du Monde, relayait les propos de Noémie, salariée au PF13 : « Durant les réunions scolaires, certains parents accusent nos actions d’éducation à la sexualité de pousser les élèves à l’homosexualité, ou d’inculquer la masturbation », regrette celle qui, à l’instar de « nombreux collègues », s’est vue traitée de « pédophile », à la fois par des enfants et des adultes, au motif que ses interventions « sexualiseraient » la jeunesse. »
Nous restons mobilisées pour faire de l'éducation à la sexualité un outil accessible à toustes et porteur de changements sociaux profonds.